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Première économie d’Asie centrale avec un PIB de 220 milliards de dollars en 2022, le Kazakhstan concentre près de la moitié du PIB d’Asie centrale. Encore largement dépendant de ses extractions d’hydrocarbures (60 % de ses exportations en valeur en 2020) et de minerais (il est le premier exportateur d’uranium au monde), le pays mène aujourd’hui sous l’impulsion de son président M. Kassym-Jomart Tokaïev une politique habile de diversification.
Ceux qui connaissent mal cet immense territoire cinq fois plus vaste que la France, mais peuplé de seulement 20 millions d’habitants, seront peut-être surpris d’apprendre que les marques de luxe les plus prestigieuses y sont déjà implantées : Louis Vuitton, Hermès, Chanel, Loro Piana, Cartier, Bulgari, Tiffany & Co, etc. Ce pourrait cependant n’être qu’un début.
Munira Artykbekova, directrice générale de la Chambre de Commerce et d’Industrie France Kazakhstan, déclare vouloir favoriser le développement de ce secteur dans un pays qui dispose déjà d’une élite fortunée : « De plus en plus de marques de luxe s’intéressent au Kazakhstan. Un exemple ? J’ai en ce moment des échanges suivis avec Sisley qui envisage de s’implanter ici. Dans les grandes villes, la clientèle est non seulement kazakhstanaise mais aussi russe et chinoise. Imaginez que certains Chinois viennent à Almaty le temps d’une journée uniquement pour faire du shopping, parce qu’ils y ont un accès plus facilement aux produits qu’ils désirent. »
Roman Vassilenko, vice-ministre des Affaires étrangères, abonde dans ce sens avec humour : « Au Kazakhstan, les gens font des prêts pour organiser leur mariage qu’ils souhaitent le plus fastueux possible ! Ceci pour vous dire que le secteur du luxe a de beaux jours devant lui. »
Aidan Karibjanov, qui préside un club réunissant les dirigeants de grandes entreprises françaises et kazakhstanaises, relativise cependant cet optimisme : « Certes plusieurs grandes marques ou groupes de luxe français sont présents au Kazakhstan, notamment à Almaty qui est la capitale économique. Mais pour ces marques le moment est délicat. Toutes avaient l’habitude de traiter le marché kazakhstanais en lien avec le marché russe. Les sanctions occidentales contre la Russie les obligent à définir une stratégie vis-à-vis de l’Asie centrale en tant que telle. Partir pour se concentrer sur la Chine ou rester et investir davantage, l’avenir le dira. »
Pour l’instant, cet avenir semble néanmoins, si ce n’est radieux, du moins prometteur grâce aux bonnes performances économies du pays et à sa démographie dynamique (3,2% de croissance démographique en 2022). De fait, après une récession en 2020 due à la pandémie, le Kazakhstan a enregistré une croissance de son PIB de 3,4% en 2022, en dépit de la baisse de sa production d’hydrocarbures et des difficultés logistiques dues aux sanctions occidentales prises à l’encontre de la Russie. La croissance a été stimulée par les exportations aux pays voisins, l’arrivée de plusieurs centaines de milliers Russes aisés ainsi qu’une diversification de l’économie dans les secteurs agricoles et manufacturés. Le FMI prévoit aujourd’hui une croissance de 4,8% du PIB en 2023. Si cette croissance ne peut que favoriser le développement du secteur du luxe au Kazakhstan, notamment des grandes maisons, elle pourrait aussi profiter à toutes ces marques relevant de ce que l’on pourrait dire de « demi-luxe » convoitées par une classe moyenne supérieure en plein essor.
Image : la boutique Tiffany & Co d’Astana dans la galerie commerciale du Ritz-Carlton.