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Le défilé menswear printemps-été 2026 de Prada avait suscité la polémique, en juin dernier à Milan. Plusieurs mois après, Prada opère un virage stratégique. Et la maison italienne vient d’annoncer un accord avec l’Inde. Les sandales de la discorde seront effectivement commercialisées. Mais les modèles proposées seront produits par des artisans indiens, selon leur savoir-faire. Un geste symbolique, mais hautement stratégique, à l’heure où l’Inde s’impose comme un marché clé du luxe mondial.
Un accord de production qui reconnaît l’héritage artisanal indien
La controverse est née en juin dernier, lors de la Fashion Week de Milan. Sur le podium de Prada, des sandales ouvertes aux lanières fines rappellent alors fortement les Kolhapuri. Il s’agit de chaussures traditionnelles indiennes vieilles de plusieurs siècles. En Inde, la ressemblance choque une partie de l’opinion publique. Et le monde artisanal y voit une appropriation culturelle non reconnue. De plus, les réseaux sociaux s’enflamment et accusent la maison italienne d’appropriation culturelle.
Face aux critiques, Prada change donc de posture. La maison italienne vient d’annonce, mi-décembre, un accord inédit. Elle fera appel aux artisans indiens pour produire 2 000 paires de sandales haut de gamme. Et ce modèle sera lancé en boutique dès février prochain. Ces sandales seront fabriquées en Inde, par des ateliers maîtrisant les techniques traditionnelles de confection des Kolhapuri. Dans le détail, leur confection utilisera notamment un cuir tanné naturellement. Et enfin, l’assemblage sera réalisé à la main.
Pour Prada, il ne s’agit plus seulement d’inspiration, mais de reconnaissance formelle d’un patrimoine vivant. L’accord entend valoriser les communautés artisanales locales. En effet, certaines d’entre elles perpétuent ce savoir-faire depuis plusieurs générations, comme à Jaipur ou dans la région de Kolhapur.
Luxe et Inde : un marché stratégique où l’erreur culturelle ne pardonne pas
Au-delà de la réponse à une polémique, cette initiative révèle un enjeu majeur pour les maisons de luxe occidentales. L’Inde s’affirme comme l’un des marchés à plus fort potentiel pour la prochaine décennie : croissance rapide des classes aisées, jeunesse ultra-connectée, appétence croissante pour les marques internationales, mais aussi forte sensibilité aux questions identitaires et culturelles.
Dans ce contexte, le luxe ne peut plus se contenter de puiser dans les esthétiques locales sans cadre clair. La frontière entre hommage et appropriation est scrutée de près. Pour séduire la clientèle indienne, les marques doivent démontrer leur capacité à co-créer, à partager la valeur et à respecter les codes culturels, plutôt que de les réinterpréter unilatéralement.
Avec cet accord autour des Kolhapuri, Prada envoie un signal fort : celui d’un luxe plus attentif, plus dialoguant, et conscient que sa désirabilité future passera autant par l’éthique culturelle que par l’excellence créative. Reste à savoir si cette démarche fera école dans une industrie désormais sommée de conjuguer héritage global et respect des identités locales.
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