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Elle était la créatrice de mode en poste depuis le plus longtemps. Mais les 37 années de Véronique Nichanian chez Hermès touchent à leur fin. Après un long mandat à la tête de la création masculine, la créatrice française s’apprête à tourner la page. Et la collection de janvier 2026 sera sa dernière. Son œuvre, discrète mais d’une rare précision, a transformé la maison, autrefois surtout connue pour sa maroquinerie, en un acteur incontournable de la couture masculine. Avec son départ, Hermès se prépare à une succession particulièrement stratégique. Car la maison française aura besoin d’un talent fort pour prendre la suite et renforcer la stratégie de conquête de la marque.
Véronique Nichanian : un pur produit Hermès
C’est en 1988 que Véronique Nichanian rejoint Hermès. Mais sa carrière dans la maison commence au sein du studio dévolu aux collections féminines. Par la suite, elle prend en charge la création masculine, au début des années 1990. Pour celle qui maîtrise parfaitement les codes du luxe français, le travail se fonde immédiatement sur une combinaison entre rigueur artisanale et innovation subtile.
Tout au long de sa carrière, Véronique Nichanian cultive une approche minimaliste, mais extrêmement réfléchie. Elle privilégie la matière, la coupe et le geste créatif plutôt que la mise en avant de logos. Une logique qui fait écho à l’identité d’Hermès, une maison peu encline à jouer la carte de la tendance.
Hermès, de la maroquinerie à la couture
En 37 ans, et bien qu’elle soit peu médiatisée, Véronique Nichanian a été un artisan infatigable de la croissance de Hermès. Et surtout, de la consolidation de sa légitimité sur le segment de la couture. Car quand elle prend les rênes de la création masculine, Hermès est avant tout réputée pour son savoir-faire en maroquinerie et en sellerie. Et la couture, bien que présente, se trouve éclipsée par le succès des sacs Hermès.
Mais à la fin des années 1990, Hermès parie sur sa capacité à transposer son savoir-faire dans le domaine du prêt-à-porter. Et tandis que Martin Margiela installe les collections Hermès dans la mode féminine, Véronique Nichanian transforme les collections masculines en laboratoire d’excellence. Son style se distingue par des matières sublimées (notamment le cuir), des volumes repensés et un parfait équilibre entre tradition et modernité. Et surtout, la créatrice installe dans la durée sa vision propre de la mode pour hommes. « Mon envie a toujours été de créer des vêtements d’aujourd’hui pour longtemps. Pour moi, il n’y a pas un homme Hermès mais des hommes Hermès. »
Grâce à elle, Hermès Hommes s’impose dans le prêt-à-porter masculin, non pas par des effets spectaculaires, mais plutôt par la cohérence, la précision et la justesse des propositions esthétiques. La maison, autrefois centrée sur la maroquinerie, est parvenue à déplacer son centre de gravité. Et sa légitimité dans l’univers couture est désormais une évidence.
La maison Hermès a elle-même salué l’apport de la créatrice dans son communiqué de presse. « Nous remercions chaleureusement Véronique pour son œil, sa vision, sa générosité, son énergie et sa curiosité. Forte de son talent, elle a mené avec conviction et fantaisie la destinée d’un homme qui marche avec allure. Le succès de l’univers masculin lui doit beaucoup. Funambule amoureuse de la vie, elle a toujours trouvé le ton juste en ne transigeant jamais sur l’exigence, la qualité et l’humour. »
Hermès en 2026 : une nomination forcément stratégique
Remplacer Véronique Nichanian ne sera pas chose aisée pour Hermès. Car la créatrice française a joué un rôle décisif dans le développement de l’offre couture de la maison. Et son départ intervient dans un moment stratégique.
En effet, Hermès souhaite poursuivre sa conquête internationale. Et elle ambitionne de renforcer sa position sur le segment couture, comme l’illustre bien son intention de lancer prochainement des collections de haute couture. La maison devra donc trouver un successeur capable de respecter l’ADN Hermès tout en apportant un regard neuf. Quelqu’un capable de répondre aux ambitions internationales de la maison parisienne. La maison pourrait faire le choix d’une promotion en interne. Mais plus vraisemblablement, elle devrait choisir un créateur déjà établi dans l’espace médiatique.
Au-delà de cette première échéance, la nomination du remplaçant de Véronique Nichanian donnera aussi une bonne indication du genre de talent que Hermès veut recruter pour renforcer son équipe créative. Car pour l’heure, même si la maison a annoncé sa volonté d’aller sur le segment de la haute couture, elle n’a pas précisé qui dirigerait les collections. Nadège Vanhee-Cybulski, en charge des collections féminines, pourrait endosser ce rôle. Mais Hermès peut aussi faire un choix plus original, comme l’associer à son homologue masculin.
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